Culture de bactéries marines du clade SAR202
Nature Communications volume 14, Numéro d'article : 5098 (2023) Citer cet article
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Les bactéries du clade SAR202, au sein du phylum Chloroflexota, sont omniprésentes dans l'océan mais n'ont pas encore été cultivées en laboratoire. Il a été proposé que les anciennes expansions de paralogues d'enzymes cataboliques aient élargi le spectre des composés organiques que les bactéries SAR202 pourraient oxyder, conduisant à des transformations du cycle du carbone terrestre. Nous rapportons ici la culture réussie de la bactérie SAR202 à partir d’eau de mer de surface en utilisant une culture de dilution jusqu’à extinction. La croissance de ces souches est très lente (0,18 à 0,24 jour−1) et est inhibée par l'exposition à la lumière. Les génomes, de ca. 3,08 Mbp, codent pour les archaelles (structures de motilité des archées) et plusieurs ensembles de paralogues enzymatiques, dont 80 gènes codant pour les enzymes de la superfamille des énolases et 44 gènes codant pour les déshydrogénases dépendantes du NAD (P). Nous proposons que ces paralogues enzymatiques participent à de multiples voies parallèles pour le catabolisme non phosphorylatif des sucres et des acides sucrés. En effet, nous démontrons que les souches SAR202 peuvent utiliser plusieurs substrats métabolisés par les voies prévues, tels que les sucres ʟ-fucose et ʟ-rhamnose, ainsi que leurs formes lactones et acides.
Le clade SAR202 du phylum Chloroflexota est omniprésent dans l'océan, représentant 10 à 30 % des procaryotes planctoniques des profondeurs marines1,2,3,4,5,6,7. Diverses propriétés associées à l'organohétérotrophie et au métabolisme du soufre et de l'azote ont été interprétées à partir des assemblages du métagénome SAR202 et des séquences du génome unicellulaire6,8,9,10,11,12. Les sept groupes (sous-clades) de SAR202 sont individuellement distincts par le nombre et les types de paralogues qu'ils contiennent, suggérant une relation entre l'évolution des paralogues et la spécialisation de niche des sous-clades.
Il est proposé que les gènes paralogues de monooxygénase dépendant de la flavine du groupe III SAR202, dépassant dans certains cas 100 par génome, aient évolué pour récolter le carbone et l'énergie de diverses molécules organiques accumulées dans les océans au cours de l'expansion du cycle du carbone terrestre, suite à l'augmentation de phototrophie oxygénée8,12,13. De même, dans le groupe I SAR202, il est proposé que de grandes expansions de paralogues dans la superfamille des protéines énolases aient évolué pour permettre à ces cellules de métaboliser des composés qui résistent à l'oxydation biologique en raison de leur complexité chirale. La ramification précoce de ces paralogues dans les arbres phylogénétiques indique que l'évolution des cellules SAR202 a été un creuset pour leur diversification8,12,13.
Les cellules SAR202 se trouvent dans toutes les colonnes d’eau océanique, atteignant leur nombre le plus élevé près de la surface de l’océan, mais elles contribuent à un pourcentage plus élevé de toutes les cellules planctoniques dans les zones méso-, bathy-, hadal- et abyssopélagique5,10,12. Les groupes I et II SAR202 possèdent des gènes de rhodopsine dans leur génome et constituent le SAR202 le plus abondant dans les environnements épipélagiques, tandis que le groupe III, dépourvu de gènes de rhodopsine, est en grande partie responsable de la forte abondance relative de SAR202 dans l'océan sombre.
La culture de types cellulaires non représentés est une priorité pour les microbiologistes car les cellules présentent souvent des propriétés qui ne peuvent pas être facilement prédites à partir de leur génome14. Une étude récente a montré que l'inférence basée sur le génome ne parvient pas à prédire de manière fiable les voies cataboliques pour plus de 50 % des sources de carbone utilisées par divers procaryotes disposant de données phénotypiques bien organisées15. Malgré le récent regain d’intérêt et les progrès technologiques en matière de culture, une forte proportion de groupes procaryotes restent incultes16. Le clade SAR202 n’a pas encore d’isolats cultivés, ce qui en fait l’un des « plus recherchés » en culture et une « cible clé pour la culture »14,17.
Nous rapportons ici la culture réussie de la bactérie SAR202. Vingt-quatre isolats de la sous-clade I ont été récupérés à partir d'échantillons d'eau de mer de surface par dilution jusqu'à extinction dans un milieu d'eau de mer stérile. Reconstruction métabolique étayée par des données expérimentales avec des cellules impliquées dans des paralogues d'énolase et de déshydrogénase dans l'oxydation non phosphorylative des sucres. Nous proposons que plusieurs voies métaboliques parallèles de ce type permettent à ces cellules de récolter des mélanges complexes de composés liés au sucre à partir de réservoirs de carbone organique dissous. SAR202, présent dans toute la colonne d’eau des océans modernes, a évolué parallèlement à l’essor de la phototrophie oxygénée13. Nous proposons qu’ils se soient étendus au créneau de la récolte de molécules diluées et diverses liées aux glucides à mesure que les océans sont oxydés.